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Le cordon sanitaire politique plus que jamais sous tension

Le cordon sanitaire politique consiste à tenir l’extrême droite à l’écart du pouvoir : sur ce plan-là, ces trente dernières années, il a tenu vaille que vaille. Mais qu’en sera-t-il au lendemain du 9 juin ? Le cordon visait aussi à empêcher les fascistes de contaminer le débat et les idées politiques. Et là, il y a belle lurette qu’il est mis en échec…

La société civile – ici, une délégation de la Coordination antifasciste belge, représentée dans la manifestation du 24 mars dernier à Bruxelles – est vent debout contre l’extrême droite.
La société civile – ici, une délégation de la Coordination antifasciste belge, représentée dans la manifestation du 24 mars dernier à Bruxelles – est vent debout contre l’extrême droite.

Il y a cordon sanitaire et cordon sanitaire. « Sanitaire », ça au moins, c’est clair : il est bien question de salubrité publique, de préserver la santé de la démocratie. Comment ? Grâce à un cordon. Et c’est là que les choses se corsent. De quel cordon parle-t-on ?

Car de « cordon », il y en a deux types. Il y a le « cordon sanitaire politique », d’une part, et le « cordon sanitaire médiatique », de l’autre, une appellation pas très heureuse dans ce cas-ci, et qui prête à confusion. Et ce d’autant plus que le cordon sanitaire politique comporte, lui-même, un volet médiatique. De quoi s’égarer, confondre, parler de l’un en pensant à l’autre, ou penser à l’un en parlant de l’autre. Bref, un peu de clarté s’impose.

Reprenons donc, en commençant par le cordon sanitaire politique, le seul, en fait, qui constitue un vrai cordon, et solide avec ça, puisque voici plus de trente ans qu’il résiste, même s’il s’est effiloché ici ou là, plus ou moins légèrement, mais sans jamais lâcher… en tout cas jusqu’à présent. Et tous les démocrates du pays croisent les doigts pour qu’il résiste encore après les élections du 9 juin, pressenties comme traumatiques pour les démocrates, c’est-à-dire victorieuses pour le Vlaams Belang. Et qu’il résiste aussi – car il sera sans doute soumis à plus de pressions encore dans plusieurs localités flamandes – au lendemain des élections communales du 13 octobre prochain.

Petit retour en arrière. Tout démarre au lendemain des élections communales du 9 octobre 1988 : le Vlaams Blok (depuis lors rebaptisé en Vlaams Belang) réalise de spectaculaires avancées dans plusieurs communes, notamment à Anvers. Quelques mois plus tard, le 10 mai 1989, les partis social-chrétien, socialiste, libéral et écologiste flamands, ainsi que la Volksunie, soit les cinq principaux partis du nord du pays, signent un texte dans lequel ils s’engagent à ne jamais faire alliance avec le Vlaams Blok, à quelque niveau de pouvoir que ce soit (1). L’expression « cordon sanitaire politique » fait son entrée dans le vocabulaire politique. Passons sur le fait que, quelques semaines plus tard, plusieurs signataires dénoncent l’accord fraîchement signé : dans les faits, le Vlaams Blok reste écarté du pouvoir.

Anatomie d’un cordon

Coup de projecteur sur le cordon sanitaire médiatique, source de certains malentendus et traditionnellement sur le grill à l’approche d’élections.

L’extrême droite est aux commandes en Hongrie et en Italie. Elle participe au gouvernement en Finlande. En Suède, un gouvernement minoritaire composé des partis de droite a pu se constituer au lendemain des élections de 2022, grâce à son soutien. Elle trépigne devant la porte du pouvoir en France, aux Pays-Bas, en Allemagne, et on en passe.

Le Belgique n’est pas à l’abri : à la veille des élections législatives, régionales et européennes du 9 juin, et à l’avant-veille des élections communales du 13 octobre prochain, les démocrates s’inquiètent de la nouvelle montée en puissance des partis d’extrême droite. Particulièrement du côté flamand, où le Vlaams Belang (VB) est donné à près de 30%. Ce qui veut dire, aussi, que le « cordon sanitaire » risque d’être prochainement soumis à rude pression.

Le « cordon sanitaire » ? L’expression désigne – on fait court – l’engagement politique pris par des partis francophones et flamands (sauf la N-VA) de ne pas gouverner avec l’extrême droite. Jusqu’ici, ce « cordon politique » est (presque) totalement respecté. Mais dans les prochaines semaines la N-VA (donnée à environ 20%) pourrait être tentée de composer une majorité régionale « nationaliste » avec le Vlaams Belang. On imagine sans peine la tempête politique qui s’ensuivrait à l’échelon fédéral…

Du côté francophone, où l’extrême droite reste groupusculaire – on n’a pas dit inexistante -, il n’y a évidemment actuellement pas grand mérite à respecter le cordon sanitaire politique. Mais nous ne sommes pas à l’abri d’un sursaut – d’une alliance ? – des partis d’extrême droite en juin, ni de leur implantation, ça et là, au niveau local, au lendemain des élections communales d’octobre prochain. Donc, le cordon politique, on y tient, il faut le répéter.

En revanche, un autre « cordon » fait débat, on veut dire le « cordon sanitaire médiatique ». De quoi s’agit-il ? En gros, de l’engagement des médias francophones à ne pas donner la parole aux représentants de l’extrême droite dans leurs colonnes ou sur leurs plateaux. Ce cordon-là n’existe qu’au sud du pays : au Nord, il s’est vite avéré impossible à tenir tant les scores du Vlaams Blok d’abord, du Vlaams Belang ensuite, ont rendu la présence médiatique des extrémistes incontournable. « A voir, contestent en substance certains observateurs auxquels nous donnons la parole dans ce dossier : ne serait-ce pas plutôt en raison du fait que l’extrême droite a si rapidement et si largement obtenu droit de cité dans les médias qu’elle a cru et embelli en Flandre, mais aussi en France, en Italie, etc. ? Et, poursuivent-ils logiquement, n’est-ce pas précisément en raison du fait qu’elle soit interdite d’antenne en Belgique francophone qu’elle ne parvient pas à s’y implanter ? » Celles et ceux qui favorisent cette thèse se positionnent fermement en faveur du maintien de ce fameux « cordon sanitaire médiatique » qui, notons-le, est unique en Europe. Certains plaident même, nous le verrons dans ce dossier, pour qu’il soit étendu à l’encontre de ceux et celles qui, au sein de partis démocratiques, tiennent des propos qui heurtent les oreilles des militants antifascistes.

D’autres, nous les entendrons aussi, se montrent plus nuancés, voire carrément sceptiques à l’endroit de ce cordon médiatique. « Lequel, argumentent-ils en substance, est souvent mal compris, et s’apparente parfois à un alibi derrière lequel les journalistes dissimulent parfois une certaine forme de paresse intellectuelle, ou à une entrave à la liberté d’expression. »

Avec ce dossier consacré au « cordon sanitaire médiatique », Ensemble ! espère contribuer à favoriser la compréhension de ce qu’il est et de ce qu’il n’est pas, car il est sujet à plusieurs interprétations et donc, aussi, à une certaine confusion. Aider à cerner les contours précis du « cordon médiatique », ce qu’il implique – ou devrait impliquer – pour les journalistes, histoire d’en identifier sereinement ses bienfaits et ses effets pervers : tel est notre objectif.

Le Zwarte zondag

Le 24 novembre 1991, date des élections législatives et provinciales, l’extrême droite réalise une percée qualifiée alors d’« historique » : surtout en Flandre, où le Vlaams Blok recueille la voix d’un électeur sur dix et remporte 12 sièges sur 212 à la Chambre des représentants – à cette époque, on jugeait cela catastrophique -, mais aussi, dans une moindre mesure, en Wallonie, où le Front National réalise une percée et envoie un élu au Parlement. Cette date du 24 novembre 1991 – qualifiée de « zwartezondag », « dimanche noir » en français – est restée imprimée dans les mémoires comme un cataclysme, un coup de grisou. A partir de là, les partis démocratiques reprennent leurs cogitations visant à maintenir l’extrême droite à l’écart du pouvoir. Ils sont encouragés dans cette voie par les milieux associatifs mobilisés contre le racisme, qui enjoignent les élus démocratiques à s’engager à ne jamais conclure d’accord avec l’extrême droite.
Les partis flamands agissent sans tarder : en 1992, le Conseil flamand adopte, à la très large majorité, une motion jugeant le programme du Vlaams Blok « pour la solution du problème des étrangers » contraire à la Convention européenne des droits de l’Homme. Dans la foulée, les cinq partis flamands qui avaient signé le premier texte en mai 1989 concluent un nouvel accord : il exclut l’extrême droite de toute coalition politique ; il prévoit aussi que les partis démocratiques ne compteront jamais sur l’appoint des voix de l’extrême droite pour faire passer un texte de loi, et enjoint les élus démocratiques à ne pas « fréquenter » les élus d’extrême droite. Ce pacte a été réaffirmé en mai 2000 dans une « charte pour la démocratie ». Un « détail » qui a toute son importance : la N-VA est née en 2001 de l’éclatement de la Volksunie : le parti de Bart De Wever n’a donc jamais été partie prenante de cette charte, et ne s’est jamais engagé à respecter le cordon sanitaire politique…

Barrer à l’extrême droite l’accès au pouvoir : tel est le volet principal du cordon sanitaire politique auquel se sont engagés les partis démocratiques – mais pas la N-VA, et qui constitue une spécificité belge.
Barrer à l’extrême droite l’accès au pouvoir : tel est le volet principal du cordon sanitaire politique auquel se sont engagés les partis démocratiques – mais pas la N-VA, et qui constitue une spécificité belge.

La difficile réalité flamande

Disons-le d’emblée : l’intention de ne pas frayer avec les élus d’extrême droite n’a jamais été suivie d’effets en Flandre. « Ce volet-là du cordon sanitaire politique ne dépend pas seulement des partis, souligne le philosophe Vincent de Coorebyter, président du Centre de recherche et d’information socio-politiques (Crisp), et professeur de philosophie sociale et de politique contemporaine à l’ULB. Les journalistes en sont également des acteurs de taille. S’ils insistent pour organiser des débats entre des représentants de partis démocratiques et l’extrême droite, il est impossible de résister longtemps : s’abstenir de débattre avec l’extrême droite, c’est facile dans les médias ne sont pas demandeurs. Et à la buvette du Parlement, entre gens ‘‘civilisés’’, c’est difficile de refuser une main tendue ou d’échanger quelques mots avec d’autres élus, fussent-ils d’extrême droite, et surtout lorsque ces derniers sont en nombre… » Bref : du côté flamand, les représentants des partis démocratiques et les fascistes bavardent et débattent gentiment.

Un cordon à géométrie variable

Pour ce qui est du volet « On tient l’extrême droite à l’écart des prises de décision, on ne fait pas dépendre le vote d’un texte d’un appui extrémiste », le cordon a tenu bon dans les grandes lignes, mais il a quand même subi quelques effilochages. Un exemple : en juin 2006, la Chambre des représentants a voté, élus flamands (y compris ceux du Vlaams Belang donc), la prise en considération d’une résolution du Vlaams Belang demandant de « préparer le démembrement de la Belgique ». On relèvera toutefois l’abstention de Herman De Croo, le président libéral de la Chambre. Un autre exemple : en 2007, c’est sur la proposition du Belang que les partis flamands – hormis Groen – ont fait front commun pour imposer l’urgence au vote, en commission de l’Intérieur de la Chambre, d’un texte scindant l’arrondissement de BHV…

Quant au volet – évidemment fondamental – portant sur l’engagement de ne pas faire alliance avec l’extrême droite, à quelque niveau de pouvoir que ce soit, il tient bon vaille que vaille même, si là aussi, quelques entorses sont à déplorer sur le terrain communal : à Grimbergen, par exemple, depuis 2022, le bourgmestre n’est autre que Bart Laeremans, un ancien du Vlaams Belang portant désormais le faux nez de la liste Vernieuwing (Renouveau)…

Et après le 9 juin ? Et après les communales d’octobre ?

On se demande évidemment avec inquiétude si l’engagement des partis démocratiques de ne pas faire alliance avec l’extrême droite résistera au vraisemblable nouveau bond en avant du Vlaams Belangde juin. « On sent bien que Bart De Wever, le président de la N-VA est ‘‘flottant’’ – il laisse planer l’équivoque sur son attitude au cas où le Vlaams Belang virerait ses brebis galeuses, etc., observe Vincent de Coorebyter. Et on sent bien aussi qu’au sein de la N-VA, il y a un courant qui verrait d’un très bon œil une alliance régionale – sans parler du terrain communal – avec le Belang. Certes, un rapprochement de ce type créerait de fameux remous et tensions, au sein de la N-VA et du monde politique flamand, mais on n’est pas à l’abri… »Et la même question lancinante se posera encore, et peut-être plus fortement encore, si le Belang – ou certains de ses représentants « déguisés » sous des listes baptisées d’un autre nom mais véhiculant la même idéologie – s’impose dans plusieurs communes du nord du pays en octobre prochain. En plus de trente ans, donc, l’extrême droite n’a jamais accédé au pouvoir. Ce qui n’a pas pour autant suffi à la faire reculer durablement dans les urnes…

Le cordon version francophone, en trois volets

Et du côté francophone ? Là, il aura fallu attendre 1993 – soit avec quatre ans de retard sur la Flandre,mais il faut dire que, vu les relativement faibles scores de l’extrême droite au sud du pays, il y avait moins d’urgence – pour qu’un cordon sanitaire politique, baptisé « charte de la démocratie » voie le jour. Il est signé par quatre partis – le PS, le PSC, le PRL et le FDF -, qui s’engagent à ne pas se laisser contaminer par des idéologies anti-démocratiques et à ne pas gouverner avec l’extrême droite. Réactualisée en 1998, elle est complétée en 1999 par un « code de bonne conduite » des mandataires politiques. En 2002, cette charte est à nouveau réactualisée et complétée par le PS, le MR, Écolo et le PSC : elle reprend les engagements du passé et invite à respecter le code de bonne conduite adopté trois ans plus tôt. La dernière version de cette charte de la démocratie version francophone – au contenu très semblable à la version de 2002 – date du 5mai 2022, et elle a recueilli les signatures de Paul Magnette (PS), Georges-Louis Bouchez (MR), Rajae Maouane et Jean-Marc Nollet (Écolo), Maxime Prévot (Les Engagés) et François De Smet (Défi). Ce cordon sanitaire politique comporte trois volets : 1/ on ne fait pas alliance avec l’extrême droite ; 2/ on ne fait pas dépendre l’adoption d’un texte législatif des voix de l’extrême droite ; 3/ on ne fréquente pas les représentants de l’extrême droite, on ne débat pas aux eux.

Usures sur le flanc médiatique

Côté francophone, ces recommandations sont respectées, « en gros », l’essentiel est sauf. Le volet médiatique du cordon politique a quand même subi quelques pressions, d’aucuns diront même quelques ruptures. En 1994, Gérard Deprez, alors président du PSC, avait accepté de débattre avec Daniel Féret, président du Front National, sur un plateau de télé (Controverse, RTL-TVI) : rupture manifeste du volet médiatique du cordon sanitaire politique, mais il est vrai qu’à cette date, il n’en est encore qu’à ses balbutiements. En 2019, le PTB suscite la polémique lorsque son président, Peter Mertens débat– en flamand – avec le président du Vlaams Belang, Tom Van Grieken, dans les colonnes de l’hebdomadaire dominical De Zondag. Certes, Peter Mertens est de la circonscription d’Anvers et est donc stricto sensu un Flamand (et le volet médiatique du cordon sanitaire politique ne s’est jamais appliqué aux Flamands), et De Zondagest un média flamand, mais… le PTB est un parti unitaire, donc les francophones ont considéré que Mertens était autant « Flamand » que « francophone » et qu’en cette qualité il avait rompu le cordon.
Rebelote le 20 avril 2022 : Georges-Louis Bouchez, président du MR, a débattu -en français – avec le même Tom Van Grieken, à l’invitation de la VRT. Là, les choses sont plus claires : certes, il a rompu le cordon sur un plateau de télé flamand, là où le volet médiatique du cordon sanitaire politique ne s’est jamais appliqué,mais il l’a bel et bien rompu…

Devant l’avalanche de critiques qui s’est abattue sur Bouchez après ce mémorable débat, l’intéressé s’est défendu, sur les réseaux sociaux, en arguant du fait que « le cordon sanitaire, c’est de ne pas conclure des accords avec l’extrême droite et l’extrême gauche. Pour les débats, en Flandre, le Belang est sur les plateaux depuis longtemps. Donc, j’ai brisé quoi ? » Le président du MR a été invité à revoir ses leçons. De un : l’engagement des présidents de parti ne porte pas sur l’extrême gauche ; de deux : cet engagement comporte aussi un volet médiatique, du moins côté francophone, et ne porte donc pas exclusivement sur la « conclusion d’accords » comme feint de le croire Bourchez.

Le 20 avril 2022, Georges-Louis Bouchez, président du MR, a débattu -en français - avec Tom Van Grieken, le président du VB, à l’invitation de la VRT. Il a rompu le volet médiatique du cordon sanitaire politique, en vigueur en Belgique francophone.
Le 20 avril 2022, Georges-Louis Bouchez, président du MR, a débattu -en français - avec Tom Van Grieken, le président du VB, à l’invitation de la VRT. Il a rompu le volet médiatique du cordon sanitaire politique, en vigueur en Belgique francophone.

Les points sur les i

Suite à cette fâcheuse anecdote, le 8 mai 2022, la charte de la démocratie est réactualisée, reprécisée, et réaffirme les valeurs et les différentes facettes du cordon sanitaire politique : pas d’alliance avec l’extrême droite, et pas de débat non plus avec ses représentants. Le MR, le PS, Ecolo, Défi et les Engagés ne monteront dans aucun gouvernement avec l’extrême droite et ne participeront à aucun débat dans les médias traditionnels ou sur les réseaux sociaux avec des représentants des partis « qui manifestement portent des idéologies ou des propositions susceptibles d’attenter aux principes démocratiques qui fondent notre système politique ». Ce sont les termes de la nouvelle Charte de la démocratie, actualisée et renforcée. Le Parti du Travail de Belgique (PTB/PVDA), tout en disant « partager le combat », a refusé de s’y associer, estimant qu’en tant que « parti national», il ne pouvait s’exclure des plateaux flamands où le cordon médiatique n’est pas en vigueur, et dans une Flandre où l’extrême droite présente un poids électoral significatif (2).

Par ces partis «qui manifestement portent des idéologies ou des propositions susceptibles d’attenter aux principes démocratiques qui fondent notre système politique», il faut entendre les formations d’extrême droite et toute autre organisation liberticide ou sectaire. L’extrême gauche, incarnée en Belgique par le PTB, ne présente pas, pour sa part, de telles caractéristiques antidémocratiques, liberticides ou sectaires, et ce même si le parti est, effectivement, situé à un « extrême » de l’échiquier politique. N’en déplaise à Georges-Louis Bouchez, qui aurait aimé que le texte vise aussi l’extrême gauche qu’il juge antidémocratique…

Le domaine des idées contaminé

Hormis, donc, plusieurs tensions sur le point de savoir s’il faut débattre ou pas avec l’extrême droite, l’engagement des partis francophones démocrates de ne pas fréquenter les partis d’extrême droite et de ne pas faire alliance avec elle n’a pas connu d’entorses. Il faut avouer que, vu l’absence d’une réelle et persistante percée électorale des groupuscules d’extrême droite, le respect du cordon sanitaire politique par les partis démocratiques ne relève pas franchement de l’exploit. Mais le respect de cet engagement a-t-il pour autant permis d’éviter que la plupart des partis démocratiques du nord du pays, mais aussi le MR du côté francophone, ne soient contaminés par les idées chères à l’extrême droite ? A-t-il permis d’éviter que ses thématiques de prédilection – les questions sécuritaires ou d’immigration notamment – ne viennent infester le débat public ? D’éviter que ses « solutions » ne deviennent celles, certes un peu édulcorées, des démocrates ? Poser la question, c’est hélas y répondre…

(1) Jos Geysels, alors secrétaire politique d’Agalev (rebaptisé depuis Groen), fut à l’origine du cordon sanitaire politique en Flandre : lire son interview dans Ensemble ! n°100, septembre 2019

(2) « Voici la nouvelle ‘‘Charte de la démocratie’’ réaffirmant le cordon sanitaire, Le Soir, 6 mai 2002.

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