C.P.A.S.

CPAS et extraits bancaires : une politique antisociale et illégale

Beaucoup de bénéficiaires du CPAS se plaignent d’intrusions dans leur vie privée. Pour continuer à bénéficier du revenu d’intégration, ils doivent régulièrement fournir de multiples documents et informations qui sont pourtant souvent déjà en possession du CPAS, ainsi que leurs extraits bancaires des trois derniers mois. Certains CPAS mènent cette « politique » de manière systématique, envers tous leurs usagers, lors de chaque révision de dossier. Et gare aux récalcitrants…

Au service Infordroits du CSCE – ainsi que dans d’autres services d’aide juridique et/ou sociale -, nous en rencontrons souvent, de ces usagers de CPAS excédés par les intrusions répétées dans leur vie privée. L’accès à toutes leurs dépenses personnelles, par le CPAS, est-il vraiment indispensable à l’examen de leur demande ? Bien sûr que non ! Mais si ces personnes tentent de discuter, de comprendre – notamment au clours des auditions devant le Comité -, ces personnelles se retrouvent le plus souvent privées de tout revenu. Intentent-elles une action devant le tribunal du travail ? Même si le jugement leur est favorable, le CPAS pourtant fautif ne modifie pas toujours son comportement.

Certains CPAS exigent, lors d’enquêtes sociales menées régulièrement (au minimum, une fois par an), que leurs usagers remettent toutes sortes de nouveaux documents pour vérifier que les conditions d’octroi du revenu d’intégration ou des aides complémentaires restent réunies. Très souvent, ces documents s’avèrent inutiles car la situation n’a pas changé. Pourtant, au fil du temps, la pratique n’a fait que se répandre. Certains CPAS vont jusqu’à exiger, de la part de leurs usagers, les extraits bancaires des trois derniers mois pour délivrer une attestation permettant d’obtenir une aide alimentaire auprès d’associations privées, et ce même en cas de situation de médiation de dettes ! Ces contraintes ne sont parfois imposées qu’au moment de l’introduction d’une nouvelle demande, ou au moment de la révision du dossier en vue de la prolongation du droit, mais elles peuvent l’être aussi tout au long de la période de l’octroi de l’aide, voire pour des périodes sans aides (les trois mois précédant la demande, par exemple).

Les CPAS ne respectent pas les recommandations de leur autorité de tutelle !

A ce stade, donc, une question se pose : certes, il est « immoral » d’exiger des extraits de compte, mais est-ce pour autant illégal ? Il faut distinguer deux situations différentes : celle qui prévaut dans le cadre de l’examen du droit au revenu d’intégration (pour la condition de ressources insuffisantes), et celle qui prévaut règne dans le cadre de l’examen du droit à des aides sociales (pour la condition d’état de besoin). Nous limiterons principalement notre présente analyse à la pratique dans le cadre de l’examen du droit au revenu d’intégration (RI).
La plupart des personnes ne désirent pas dévoiler leur intimité et tiennent au respect de leur vie privée, et c’est bien normal. Il en va des même des bénéficiaires des CPAS, qui n’apprécient pas devoir faire étalage de toutes leurs dépenses, des endroits qu’ils fréquentent, etc., si ce n’est pas obligatoire pour l’examen de la condition de ressources (ou d’état de besoin), ni nécessaire à l’analyse de leurs droits. Face à cette résistance, certains CPAS décident de « suspendre » leur revenu d’intégration (RI) pour « refus de collaboration ». Pour défendre leur vie privée, mais surtout leur revenu de subsistance, ces personnes se retrouvent souvent sans autre choix que d’introduire des recours devant les tribunaux. Parfois, une audition suffit pour faire rétablir leurs droits devant le CPAS et démontrer que les conditions sont bien réunies malgré le refus de transmettre les extraits bancaires. Parfois, ce droit n’est rétabli que provisoirement, jusqu’à une nouvelle enquête sociale où tout recommence. Souvent, elles se retrouvent contraintes de céder pour ne pas subir de retards, de retrait ou de sanction…

Il n’y a pas d’obligation légale de présenter ses extraits de compte ni de justifier ses dépenses mensuelles au CPAS.

Nous pouvons pourtant nous appuyer sur de nombreux rapports du service d’inspection du SPP Intégration sociale – organe de tutelle des CPAS, censé veiller à l’harmonisation des pratiques, à la mise en place d’une cohérence dans un service, à tendre à l’égalité de traitement des personnes dans les dossiers traités par les différents fonctionnaires et à rendre un peu plus prévisible les actions de l’administration. Les circulaires du SPP IS ne sont en principe pas contraignantes pour les citoyens et les juridictions mais bien pour leurs administrés (les CPAS). II arrive que des circulaires publiées deviennent une source formelle du droit : par souci de sécurité juridique, les juridictions refuseront que les administrations s’écartent des circulaires qui ont reçu une certaine publicité. Les rapports publiés – qui se répètent depuis 2015 (1) – s’opposent fermement à l’obligation de fournir tous les extraits de compte, et demandent aux CPAS de revoir leurs pratiques en la matière. Ils sont en effet limpides : il n’y a pas d’obligation légale de présenter ses extraits de compte ni de justifier ses dépenses mensuelles au CPAS, et les ingérences dans la vie privée des usagers sont inacceptables. Ils insistent sur l’obligation des CPAS de respecter la vie privée des usagers, et de récolter les informations nécessaires à la vérification des conditions d’octroi par les canaux officiels auxquels ils ont légalement accès.
Ces recommandations, restent pourtant trop souvent lettre morte. (Lire les encadrés ici et ici).

La position du SPP IS

L’autorité de tutelle le dit : le CPAS ne peut pas exiger systématiquement les extraits de compte !
Extrait de la Foire aux Questions (FAQ) sur le site web du SPP Intégration sociale, 21.09.2015 – www.mi-is.be:
« Est-ce que le CPAS peut demander systématiquement des extraits de compte des trois mois précédents dans le cadre de son enquête sociale?
Non. Même si l’examen des ressources fait partie indéniable de l’enquête sociale, il n’est pas permis au centre de demander systématiquement à l’intéressé des extraits de compte des trois mois précédents.
Une pratique pareille constitue une ingérence dans la vie privée de l’intéressé. Celui-ci ne peut pas être obligé de donner un aperçu de ses dépenses mensuelles. Sinon ceci impliquerait que le CPAS ajouterait une condition à la loi qu’elle ne prévoit pas.
Au moment de la demande, le CPAS doit contrôler si l’intéressé remplit les conditions stipulées par la loi, entre autres s’il dispose ou peut disposer des ressources suffisantes à ce moment. Le CPAS peut obtenir un aperçu des ressources de l’intéressé par d’autres moyens que par des extraits de compte (par exemple BCSS). »

Notons également que les rapports plus récents précisent que l’obligation faite au demandeur ou bénéficiaire de présenter sa carte bancaire pour permettre à l’assistant.e social.e de consulter les comptes en ligne est tout aussi illégale (2). En vertu du principe de l’exercice effectif du pouvoir d’administration, qui implique que l’administration exerce son pouvoir au cas par cas, en fonction des spécificités de chaque situation, l’administration peut s’écarter d’une circulaire-directive de son pouvoir hiérarchique si elle l’estime nécessaire. Mais le fait pour le CPAS d’en tenir compte ou non doit ressortir dans la motivation formelle de sa décision individuelle.

Enquête sociale et devoir de collaboration : que dit la loi ?

La loi du 2 avril 1965 relative à la prise en charge des secours accordés par les CPAS prévoit qu’ « une enquête sociale constate l’existence et l’étendue du besoin d’aide » (Art. 9bis). De même, la loi du 26 mais 2002 (Art. 3, 4° et 19) prévoit que le CPAS est tenu de réaliser une enquête sociale préalablement à toute décision. Cette enquête doit porter sur tous les éléments susceptibles d’avoir une influence sur les droits de la personne. « Pour examiner cette demande, l’intéressé est tenu de fournir tout renseignement et autorisation utile à l’examen de sa demande ». Toujours selon cette loi, le CPAS a l’obligation d’examiner régulièrement, et au moins une fois l’an, si les conditions d’octroi sont toujours réunies. Le demandeur doit collaborer à l’enquête sociale : il est tenu de fournir tout renseignement et autorisation utile à l’examen de sa demande. L’article 11 de la loi du 11 avril 1995, visant à instituer la Charte de l’assuré social indique toutefois que les institutions de Sécurité sociale sont tenues de recueillir d’initiative toutes les informations nécessaires à l’examen du droit. Le CPAS a notamment accès aux données de la Banque Carrefour de la Sécurité sociale (BCSS). Le CPAS peut également demander à l’administration fiscale des renseignements relatifs aux ressources et au patrimoine du demandeur et des personnes avec lesquelles il cohabite. La vérification des renseignements et déclarations du demandeur auprès des organismes financiers est toutefois soumise à l’autorisation préalable de celui-ci (3).

Les CPAS ont donc accès à énormément d’informations via les flux informatiques de la Banque Carrefour de la Sécurité sociale (BCSS). Ils sont obligés de les consulter. La loi leur permet en outre de demander des informations auprès des « administrations publiques, des institutions de Sécurité Sociale et des organismes financiers ». Très souvent, ils font d’ailleurs signer un document en ce sens lors de l’introduction de toute nouvelle demande de RI et/ou lors de révisions du dossier. Ils ne peuvent pas demander des informations et des documents qu’ils peuvent obtenir par ces différents canaux. La loi Only once de 2014 l’indique aussi clairement : elle garantit que les données déjà disponibles via une «source authentique» ne devront pas être communiquées une nouvelle fois par l’usager (4).

La Cour de cassation rappelle de manière récurrente que si le non-respect du devoir de collaboration n’est pas une condition d’octroi du revenu d’intégration, il peut empêcher de vérifier que les conditions du droit sont réunies et, en pareil cas, le CPAS peut refuser ce droit pour la période pour laquelle il ne dispose pas des éléments nécessaires à l’examen de la demande (5).

La loi prévoit donc bien que le bénéficiaire d’aides sociales a un « devoir de collaboration » : il doit fournir tout renseignement utile à l’examen de sa demande. Le CPAS doit, quant à lui, par l’enquête sociale, collaborer à administrer la preuve que les conditions d’octroi des aides sont bien réunies. La collaboration du demandeur n’est pas, en soi, une condition d’octroi. Mais si le CPAS ne peut vérifier que les conditions d’octroi sont bien réunies, alors il peut refuser le droit à l’intégration sociale, et ce pour la période pour laquelle il ne dispose pas des éléments nécessaires à l’examen de la demande. La jurisprudence confirme que les aides des CPAS ne sont pas à durée déterminée. Pour chaque décision (suspension/coupure/retrait/etc.), la notification doit être envoyée au préalable.

Or beaucoup de dossiers soumis au service Infordroits portent sur une suspension non notifiée, ni motivée, des aides sociales du CPAS, à l’occasion d’une enquête sociale. Il arrive que l’aide sociale soit suspendue alors même que la situation de l’usager n’ait changé en rien. Mais le plus souvent, cette suspension intervient lorsque l’usager bénéficie d’autres (faibles) ressources (chômage partiel, petit salaire, etc.). Le dossier est très souvent suspendu, sans notification, et le paiement retardé, le temps que le CPAS puisse effectuer les calculs, et ce même lorsque les preuves des ressources sont transmises le plus tôt possible et/ou restent inchangées. Ces nombreux révisions et/ou contrôles alourdissent aussi considérablement la charge de travail des assistants sociaux, déjà souvent surmenés. Imposer des révisions très, voire trop, fréquentes, sans aucun motif apprécié individuellement, sont fait aussi partie des pratiques disproportionnées.

Le droit au respect de la vie privée

Le droit à la vie privée est un droit fondamental garanti par l’article 22 de la Constitution (« Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf sans les cas et conditions fixés par la loi ») et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, lequel stipule ceci : « 1/ Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2/ Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

Le droit à la vie privée est un droit fondamental garanti par la Constitution et la Convention européenne des droits de l'homme.

Ce droit n’est donc pas absolu : les dispositions précitées prévoient la possibilité d’y apporter des restrictions. Ces restrictions doivent être prévues par la loi, répondre à un objectif légitime et présenter un caractère proportionnel à la réalisation de cet objectif (6). Ainsi, si l’enquête sociale suppose une certaine immixtion dans la vie privée, celle-ci ne peut intervenir que dans le cadre strict des restrictions ainsi délimitées.

L'audition au CPAS

En principe, le demandeur a le droit d’être entendu lorsqu’une décision négative risque d’être prise (ou a été prise) à son encontre. Certains CPAS décident parfois eux-mêmes de convoquer leur usager suite à un nouveau rapport négatif de l’assistant social, avant de retirer les aides. Ces auditions se déroulant devant plusieurs responsables du CPAS face auxquels il faut défendre son droit à la survie sont sources d’angoisse pour de nombreux usagers. Il est donc essentiel qu’ils se sentent accompagnés dans cette démarche, et que celle-ci reste volontaire. La convocation doit être motivée et ne peut pas ressembler à une convocation devant un tribunal de fait, sans garantie de respect des droits de la défense.

Parfois, l’audition au CPAS ne suffit pas. Pour récupérer leur revenu d’intégration (RI), certaines personnes doivent mener leur combat devant les juridictions où, heureusement, elles obtiennent souvent gain de cause. Certains CPAS ne semblent donc pas prendre au sérieux les rappels à l’ordre du SPP Intégration sociale et revendiquent leur droit de mener leur propre politique d’ « activation » et de contrôle de leurs usagers.

En matière de RI – pour les aides sociales complémentaires, les conditions sont différentes – la condition d’octroi est l’absence de ressources suffisantes. Il ne s’agit donc pas d’analyser les dépenses de l’usager. Contrôler ces dépenses semble d’autant plus inutile que le revenu d’intégration est fixe, et ce quelle que soit la hauteur des dépenses.

Contrôler dans le détail les dépenses des demandeurs semble d’autant plus inutile que le revenu d’intégration est fixe, et ce quelle que soit la hauteur de ces dépenses.

Pourtant, des CPAS suppriment encore le RI pour « manque de transparence et de collaboration quant à votre situation financière » lorsque l’usager ne transmet pas ses extraits bancaires complets, ou décide de masquer ses dépenses. Les victimes de ces pratiques doivent alors intenter des recours devant les tribunaux pour qu’ils puissent apprécier le caractère fondé et/ou proportionnel de telles exigences. Mais, même lorsqu’elles gagnent leur recours au tribunal, ces personnes ne sont pas nécessairement tirées d’affaire. Il arrive que le CPAS fasse appel – avec les deniers publics -, contre les jugements qui lui déplaisent. Les usagers du CPAS doivent donc attendre un nouvel arrêt, la peur au ventre, avec la crainte de devoir rembourser les sommes touchées, et leurs relations avec l’assistant.e social.e et le CPAS restent souvent tendues et stressantes.

Les positions de principe des CPAS…

Si les CPAS exigent la production des extraits bancaires des demandeurs, c’est parce que, plaident-ils, cela leur permet de vérifier que les ressources du demandeur la personne sont effectivement insuffisantes. Les informations disponibles sur la Banque Carrefour de la Sécurité sociale, invoquent-ils encore, ne portent pas sur l’ensemble des ressources ou ne sont pas mises à jour assez régulièrement. Seul l’examen des extraits de compte permettrait de détecter des ressources non déclarées, tels des dons réguliers, une pension alimentaire, des loyers, des ressources de capitaux, l’existence d’autres comptes bancaires, etc.).

Parmi les autres arguments invoqués par les CPAS pour justifier l’exigence de la transmission des extraits bancaires (7), relevons les points suivants :
– Il n’y a pas d’atteinte à la vie privée car le CPAS ne tire aucune conclusion des informations confidentielles qu’il recueille à l’occasion de l’examen des extraits de compte, sauf si elles permettent de suspecter que les conditions d’octroi ne sont pas remplies ; le demandeur peut occulter s’il le souhaite l’identité de ses créanciers et débiteurs (mais en aucun cas le montant des dépenses) ; les travailleurs sociaux sont tenus au secret professionnel et ne peuvent dévoiler les informations portées à leur connaissance.
– Depuis l’entrée en vigueur du RGPD (règlement général sur la protection des données), de nombreuses institutions de Sécurité sociale refusent de répondre aux demandes d’informations relatives aux montants perçus par les assurés sociaux ; la Banque Carrefour de la Sécurité sociale renseigne l’existence d’un contrat de travail mais pas sa durée, ni le montant actuel de la rémunération (et encore moins d’informations pour les travailleurs indépendants).
– L’examen des extraits de compte permet de faire un travail de prévention (gestion budgétaire).
– Empêcher le CPAS de contrôler tout mouvement bancaire des assurés sociaux reviendrait à faciliter outrageusement la fraude.

Les aides à durée déterminée sont illégales

Rapport d’inspection intégré (2015) CPAS Trois-Ponts (http://www.mi-is.be/fr/outils-cpas/rapports-dinspection):

« Décision / Notification :
Les octrois ne peuvent être limités dans le temps : en effet, le droit existe aussi longtemps que les conditions d’octroi sont remplies et il appartient au CPAS de vérifier celles-ci au minimum une fois par an. »http://www.mi-is.be/fr/outils-cpas/rapports-dinspection

… contestées par les cours et tribunaux

Plusieurs jugements et arrêts attestent, pour leur part, de l’illégalité de ces pratiques : « le CPAS ne peut exiger de manière systématique que tout demandeur produise les extraits de son compte bancaire lors de la révision annuelle ou semestrielle du droit à l’intégration sociale. Cette exigence n’est légalement justifiée que s’il existe des indices concrets et objectifs permettant de douter des informations ou déclarations de l’intéressé quant à l’étendue de ses ressources ou, en d’autres termes, si l’enquête sociale (consultation BCSS, visite à domicile, informations transmises par les inspections sociales, déclarations de tiers, etc.) a révélé des éléments qui nécessitent que des vérifications soient faites. »

La Cour de cassation – la plus haute juridiction du pays – a jugé, dans un arrêt du 5 septembre 2016, qu’une enquête bancaire approfondie ne se justifie pas en l’absence d’indices suffisants de dissimulation des ressources (5). Cet arrêt est également rappelé dans plusieurs rapports d’inspection récents qui ajoutent que « l’inspectrice sera particulièrement attentive à ce que ce type de demande ne soit plus formulée que dans d’exceptionnelles situations telles que définies par la Cour de cassation. Le rapport social devra expliciter en quoi des indices suffisants, concrets et objectifs de dissimulation de ressources existent » (voir, à ce sujet, les rapports d’inspection 2020 du CPAS d’Eghezée et CPAS de Colfontaine référencés en (1) et (2)).
Dans des jugements et arrêts encore plus récents des tribunaux du travail (7), des recours sont dirigés contre des décisions du CPAS qui suppriment le bénéfice du RI. Le paiement des arriérés de cette aide sociale depuis son retrait est exigé, ainsi qu’un dédommagement pour toute la détresse dans laquelle le CPAS a plongé sa victime.

Ces jugements et arrêts rappellent qu’en cas de révision du droit à l’intégration sociale : « C’est au CPAS qu’il incombe de démontrer que les conditions d’octroi ne sont plus remplies, le bénéficiaire n’ayant quant à lui qu’une obligation de collaboration et de participation à la charge de la preuve » (7) et (8).

C'est au CPAS qu'il incombe de démontrer que les conditions d'octroi ne sont plus remplies. Le bénéficiaire n’a, quant à lui qu'une obligation de collaboration et de participation à la charge de la preuve.

Qu’ «en réalité, le CPAS fonde sa décision sur les réticences du bénéficiaire à délivrer au CPAS, de manière systématique, et à intervalles réguliers, une copie de ses extraits de compte des trois derniers mois ; plus exactement, le CPAS a ici procédé au retrait du droit à l’intégration sociale en raison de la délivrance d’extraits de compte dont les dépenses étaient masquées. Or, les extraits de compte d’une personne, surtout s’ils étaient sur une longue période, contiennent des données relevant de sa vie privée. L’examen par le CPAS de ces extraits de compte constitue une atteinte au droit à la vie privée.»
Ces jugement et arrêts rappellent donc également les principes en vigueur en matière de droit à la vie privée dans le cadre légal du droit à l’intégration sociale. Cette jurisprudence éclaire parfaitement le problème : le CPAS ne peut exiger les extraits de compte du demandeur d’aide que dans le respect du triple principe de légalité, de légitimité et de proportionnalité.
Cette jurisprudence confirme l’absence de cadre spécifique à la demande d’extraits bancaires dans le cadre de l’enquête sociale. Au contraire, la loi limite expressément l’accès aux données bancaires des demandeurs : la vérification, par le CPAS, d’informations auprès des organismes financiers, requiert l’autorisation préalable du demandeur. Dans l’une de ces jurisprudences récentes (8), il est indiqué qu’« il ne peut donc être admis que le CPAS exige de manière systématique et indiscriminée, à intervalles réguliers, que le demandeur produise tous ses extraits de compte relatifs à une période déterminée. Ce faisant, il ajouterait une condition à la loi du 26 mai 2002, dont l’article 6 détermine les six conditions d’octroi du droit à l’intégration sociale. »

Le demandeur a personne a toutefois l’obligation légale de fournir tout renseignement utile à l’examen de sa demande. Ce n’est donc que dans ce cadre, et le tribunal le confirme, que la production d’un ou plusieurs extrait(s) de compte peut se révéler nécessaire à l’examen du droit. « Dans ce cas-là, l’objectif de cette immixtion dans la vie privée est alors légitime, s’agissant de vérifier si les conditions d’octroi du droit sont bien réunies. En sollicitant une aide de la collectivité, soumises à des conditions d’octroi relevant de l’ordre public, le demandeur s’expose à devoir porter à la connaissance du CPAS un certain nombre d’informations relevant de sa sphère privée » (9). Cette demande de production des extraits de compte doit toutefois répondre à l’exigence de proportionnalité et n’intervenir que dans la stricte mesure nécessaire pour vérifier les conditions d’octroi du revenu d’intégration sociale. La jurisprudence insiste : « Ce n’est que si les extraits sont réellement utiles et nécessaires à l’examen de la situation du demandeur que le CPAS pourra exiger de les consulter. Il s’agit d’une question de fait qui est soumise à l’appréciation du juge. »

La cour ajoute qu’en l’occurrence, cette atteinte au droit à la vie privée n’est pas justifiée au regard des exigences de légitimité et de proportionnalité, puisque rien ne permet de vérifier que cette exigence soit utile à l’examen de la demande, ou plus exactement ici, de la révision du droit. Le CPAS soupçonne-t-il que le demandeur ne répond plus à la condition d’absence de ressources suffisantes ? C’est alors lui qui a la charge de la preuve. Or rien ne permet de considérer que cette absence de ressources suffisantes, évidente depuis de nombreuses années, ne soit tout à coup plus d’actualité. L’arrêt épingle également ceci : en motivant sa décision de retrait du RI par le seul fait que les extraits de compte produits (partiellement masqués) ne satisfont pas à l’exigence du CPAS, ce dernier ajoute à la loi une condition d’octroi du droit à l’intégration sociale. La demande systématique et répétée des extraits de compte est donc bel et bien disproportionnée. Ces jugements et arrêts condamneront tous définitivement les CPAS, et consacrent ainsi la jurisprudence développée ultérieurement par la Cour de cassation, la plus haute juridiction du pays ayant jugé qu’une enquête bancaire approfondie ne se justifie pas en l’absence d’indices suffisants de dissimulation des ressources (5).
Ils rappellent enfin qu’un jugement du tribunal de travail de Liège qui a jugé que le procédé qui consiste à éplucher les extraits de compte viole le principe du respect de la vie privée, et n’est admissible que s’il est proportionné au but poursuivi, c’est-à-dire à défaut de tout autre moyen d’investigation permettant au CPAS d’obtenir l’information souhaitée (9). Le tribunal du travail de Charleroi a également jugé que le CPAS pouvait solliciter la délivrance d’une copie des extraits bancaires du demandeur, mais que ce dernier pouvait dissimuler l’identité de ses créanciers ou débiteurs (10).

Ces jugements vont donc dans le même sens que les nombreux rapports d’inspection du SPP Intégration sociale qui condamnent ces pratiques abusives. (Lire l’encadré ici)

Le CPAS rappelé vertement à l’ordre

Extraits des rapports d’inspection du SPP Intégration sociale (http://www.mi-is.be/fr/outils-cpas/rapports-dinspection)

Uccle : fin 2014 (et chaque année depuis lors)
Mais aussi, en 2015, les CPAS de Incourt, Mettet, La Hulpe, Hannut, Op-Jauche, etc.
« Extraits de compte : L’inspection a pu constater que votre centre exige de la part du demandeur de produire l’ensemble de ses extraits de comptes bancaires afin d’examiner son droit potentiel. S’il va de soi que l’examen des ressources du bénéficiaire fait partie de l’enquête sociale et que les copies d’extraits sur lesquels apparaissent les éventuelles ressources mensuelles peuvent être réclamées, ces preuves peuvent aussi être obtenues par d’autres moyens, dont les fiches de salaire, le relevé du syndicat, des caisses de paiement ainsi que les flux BCSS. En outre, exiger la production systématique des trois derniers mois d’extraits de compte complets constitue une ingérence dans la vie privée de l’usager qui n’est pas acceptable ; un bénéficiaire du droit à l’intégration sociale n’a pas l’obligation légale de présenter et justifier ses dépenses mensuelles au CPAS. De même, conditionner l’octroi ou la prolongation du DIS à la production de ces éléments n’est pas correct ; c’est l’article 3 de la Loi du 26/05/2002 qui énumère les six conditions d’octroi du droit à l’intégration sociale et il ne vous appartient pas d’en ajouter de nouvelles. Il est impératif pour le service social de revoir ses pratiques en la matière. Lors des prochaines inspections, l’inspectrice sera particulièrement attentive à ce que ce type de demande ne soit plus formulée. »

En résumé, ces diverses jurisprudences jugent ceci : lorsque les CPAS fondent leurs décisions de retrait du revenu d’intégration sur les seules réticences du bénéficiaire à délivrer, de manière systématique et à intervalles réguliers, la copie de ses extraits de compte, ou ne les délivre qu’après avoir masqué ses dépenses, ils violent bel et bien la vie privée de leurs usagers. L’exigence de production des extraits de compte n’est légitime et proportionnée à l’objectif poursuivi que si elle paraît utile et nécessaire au strict examen de la demande.

Le droit des victimes à un dédommagement

Ainsi que le relèvent les tribunaux et cours, certains CPAS paient le revenu d’intégration de manière anticipée et suspendent ce paiement sans l’avoir notifié au préalable, de façon illégale. Ils rappellent que « toute décision relative au droit à l’intégration sociale doit être précédée d’une enquête sociale ; il en est ainsi notamment en cas de décision de suspension de paiement du RI » (loi du 26 mai 2002, article 19, §1er, alinéa 1er). Ces décisions judiciaires insistent donc :
« La suspension du paiement du RI ne peut intervenir qu’en vertu d’une décision du conseil de l’action sociale du CPAS et après enquête sociale (article 24 de la loi 8 juillet 1976 organique des CPAS). Une telle suspension ne peut intervenir préventivement sur la base d’une décision de l’assistant-e social-e ou en vertu d’une pratique de « blocage » automatique préalable à la révision périodique du droit. Une telle pratique de blocage existe au sein du CPAS d’Uccle dont les rapports sociaux types comportent une case intitulée « prochaine période de blocage ». Cette pratique est régulièrement condamnée comme étant illégale par le SPP Intégration sociale lors de ses contrôles périodiques. (Lire l’encadré ici).
Cette jurisprudence confirme que la pratique de suspension du RI avant la notification de la décision litigieuse menant à la suppression du droit est illégale. Du fait que le CPAS l’assume comme telle, elle est donc fautive et doit donner lieu à des dommages et intérêts, si un dommage et un lien de causalité entre cette faute et le dommage peuvent être démontrés (cf. Art 1382 du Code civil – droit commun de la responsabilité civile). Les fautes dans le chef des CPAS (violation de l’article 22 de la Constitution, de l’article 8 de la CEDH et mépris de la position du SPP IS) ne constituent pas un comportement que devrait adopter un CPAS normalement diligent et prudent. Ces tribunaux et cours retiennent donc la faute découlant de la suspension préventive du RI et insistent encore sur l’illégalité de telles pratiques. En raison de cette faute du CPAS, les personnes se retrouvent dans des situations précaires, privées de toute ressource, et doivent s’en remettre à la charité et à l’associatif pour survivre. Les cours et tribunaux estiment donc que ces personnes ont bien subi des dommages moraux, lesquels ne sont pas automatiquement réparés au moment du rétablissement du revenu d’intégration. Pourtant généralement très frileux à l’idée de sanctionner les CPAS, des tribunaux ont condamné très récemment un CPAS au versement de dommages et intérêts (7).

Extraits de compte et jugements de valeur…

Dans le rapport d’inspection 2021 du CPAS d’Anderlues (contrôle des dossiers sociaux de RI de 2020), on trouve ceci :

« Demande des extraits des deux mois précédant la première demande :
L’examen du droit doit tenir compte des ressources présentes au moment de la demande ; il n’est pas légalement prévu de tenir compte des ressources « passées » ; dès lors seul peut être demandé l’extrait (compte courant/éventuel compte d’épargne) du jour de la demande et non pas des deux mois qui précèdent la demande. Le DIS est un droit et le CPAS ne peut émettre un jugement de valeur sur les dépenses du demandeur dans les mois qui précèdent sa demande. Il est impératif pour le service social de revoir ses pratiques en la matière. »

Non seulement ce CPAS – comme malheureusement beaucoup d’autres – continue à exiger illégalement la fourniture des extraits de compte, mais se permet d’émettre des jugements de valeur sur les dépenses antérieures à la demande du revenu d’intégration. Et il le fait ouvertement, en l’indiquant dans les rapports sociaux, sans quoi le service d’inspection ne serait pas au courant de la chose…

Bernadette Schaeck (aDas)

Les choses évoluent (trop) lentement

Suite à ces décisions judiciaires, les CPAS ont-ils revu leur copie ? S’abstiennent-ils d’exiger systématiquement les extraits bancaires complets ? Basent-ils encore leur « politique » sur des conditions illégales et antisociales ? Ont-ils adapté leurs formulaires et politiques concernant les documents intrusifs exigés et sur la délivrance d’aides à durée déterminées/suspensives sans notification préalable ?
Au vu des dossiers récents parvenus au service Infordroits, on observe une légère évolution. Un exemple : en novembre 2020, un bénéficiaire a demandé à son assistante sociale du CPAS d’Uccle si ses extraits bancaires étaient indispensables au traitement de sa demande de revenu d’intégration. Voici la réponse qu’il a reçue par mail : « Le CPAS d’Uccle demande les extraits de compte afin d’effectuer le calcul des capitaux mobiliers. Cependant, vous avez tout- à- fait le droit de vous opposer et de ne pas nous transmettre les extraits de compte. Dès lors, votre dossier passera au comité, au lieu d’être simplement signé par ma supérieure. Néanmoins, je vous assure que la plupart des bilans qui passent au comité sans extraits sont quand même prolongés sans problèmes. Donc vous avez le libre arbitre à ce niveau-là. Nous, les assistants sociaux, avons reçu comme directive de demander les extraits de compte à chaque bilan, c’est pour cela que je suis dans l’obligation de respecter les consignes. Mais nous espérons un changement, et nous comprenons tout à fait votre position. Bien à vous. » Ce positionnement est d’autant plus intéressant que le CPAS d’Uccle est souvent rappelé à l’ordre par le SPP Intégration sociale, et que sa politique a été condamnée en justice.
Dans le passé, ce CPAS contraignait ses demandeurs à fournir leurs extraits de compte complets à chaque révision semestrielle, voire trimestrielle. Ensuite, il ne l’a plus exigé qu’une fois par an, pour finalement accepter des négociations au cas par cas. D’autres CPAS recourent à cette pratique de façon détournée, sans l’indiquer de façon précise par écrit. D’autres encore semblent avoir totalement abandonné cette pratique, même lors de l’introduction d’une première demande. Les choses évoluent, donc.
Cela dit, dans certains CPAS, cette exigence est toujours bien imposée, et avec de plus en plus de force. La loi devrait pourtant être interprétées davantage en faveur des bénéficiaires pour qui le système a été mis en place. La cCour de cassation et les rapports du SPP Intégration sociale, l’organe de tutelle des CPAS, continuent de pointer ces mêmes éléments, depuis très longtemps et de façon très claire. Nous nous étonnons donc que certains aient encore recours à ces pratiques abusives, au risque de se faire sanctionner par l’organe de tutelle et condamner en justice…
Ces manières d’agir, on l’a vu, portent gravement atteinte à la vie privée : certains CPAS examinent en détail toutes les dépenses des demandeurs, d’autres « profitent » de l’occasion pour en tirer des conclusions souvent hâtives pouvant avoir des répercussions énormes. Ces pratiques s’ajoutent à d’autres violations de la vie privée, telles que les visites à domicile à l’improviste et intrusives (visites de tout le logement, y compris de la chambre à coucher, ouverture des armoires et frigo). Agirait-on de la sorte avec d’autres catégories d’usagers de services publics ? Agirait-on ainsi avec les responsables politiques qui, pourtant, devraient faire preuve d’exemplarité en matière de transparence ?
Ces pratiques intrusives dont sont victimes les plus faibles ne sont pourtant pas nécessaires à l’examen des demandes : les CPAS disposent de d’autres possibilités très (trop !) étendues pour vérifier le type et le montant des revenus du demandeur, et si ce dernier réunit les conditions d’octroi. L’obligation de fournir systématiquement tous les extraits de compte est illégale, parce que cela revient à ajouter une condition aux six conditions légales d’octroi. Or, les CPAS sont tenus de respecter la loi, pas de la modifier…

Nous nous étonnons que certains CPAS aient encore recours à ces pratiques abusives, au risque de se faire sanctionner par l’organe de tutelle et condamner en justice.

Cette indispensable et pourtant si malmenée relation de confiance

Les problèmes des usagers de CPAS commencent dès que la relation de confiance avec les assistants sociaux de leur CPAS est entachée. Leurs questions, lorsqu’ils s’adressent à nous, portent souvent sur leurs droits de la défense face à un assistant social qui ne leur parle pas de façon respectueuse, abuse de son pouvoir, n’accepte pas de leur répondre, leur impose des conditions et des démarches insupportables, ne les informe pas sur leurs droits ou ne traite pas leurs demandes.
Se tourner vers un CPAS n’est pourtant pas une démarche facile : ceux qui le font ont avant tout besoin de réconfort et d’empathie. Lorsqu’ils se rendent compte que l’assistant social est davantage motivé par le contrôle que par le désir d’octroyer une aide pourtant indispensable, le choc est énorme. L’usager ne peut pas choisir son CPAS, ni son assistant social (ou plutôt ses assistants sociaux, puisque ces derniers changent fréquemment) : quand cela se passe mal, il est donc essentiel qu’il existe des espaces de concertation et/ou des possibilités de changements.. Le service public de l’aide sociale devrait avant tout être pensé pour la réinsertion sociale des usagers. Le système devrait contribuer au au bien-être des usagers : n’est-ce pas d’ailleurs sa première mission légale, d’ordre public ?

Se tourner vers un CPAS n’est pas une démarche facile : ceux qui le font ont avant tout besoin de réconfort et d’empathie.

La balle est dans le camp du législateur.

Les associations s’affairent depuis longtemps, à travers diverses plateformes, à cerner les pratiques des CPAS en matière de vie privée, et à les améliorer. Nous l’avons dit : les choses évoluent, mais beaucoup reste à faire (11).
Nous serons attentifs aux prochains rapports d’inspection du SPP Intégration sociale et continuerons de recueillir les témoignages d’usagers en butte avec leur CPAS pour faire faire bouger les choses. Notons que les décisions et autres notes de politique interne des CPAS sont prises en huis clos, ce qui ne facilite pas le travail d’associations comme les nôtres, et ne participe évidemment pas à la transparence. Ne serait-il pas temps de changer cela également ?

Il est temps de faire preuve de clarté et d’égalité dans l’analyse des conditions d’octroi des droits les plus fondamentaux, au lieu de rajouter des conditions toujours plus subjectives, faisant peser le trop lourd poids de l’arbitraire sur les plus précarisés.
Ou bien le législateur considère – à l’instar de certains CPAS – que les rapports d’inspection adressés aux CPAS par le SPP Intégration sociale n’ont pour ces derniers qu’une valeur strictement indicative, et qu’ils ne sont pas tenus de mettre fin à des pratiques pourtant dénoncées comme illégales par leur ministre de tutelle. Dans ce cas, nos mandataires politiques devraient dissoudre un service d’inspection à vocation purement cosmétique, financé par l’argent du contribuable.
Ou alors, ces mandataires estiment qu’un CPAS, auteur de violations de la loi (et, en l’espèce, de la Constitution et de la Convention européenne des droits de l’homme) ne peut s’entêter dans la même voie en toute impunité. Ils leur incombent alors de clarifier les lois et de sanctionner les CPAS délinquants. Un régime de sanctions très précis permet bien aux CPAS de punir (parfois durement) les demandeurs d’aide sociale qui enfreignent la loi. La protection de la vie privée est devenue un enjeu politique prioritaire, qui a d’ailleurs débouché sur le nouveau RGPD (règlement général sur la protection des données).
La tolérance de l’autorité publique à l’égard des violations de la vie privée des concitoyens les plus pauvres confine à une complicité intolérable.

La tolérance de l’autorité publique à l’égard des violations à la vie privée des concitoyens les plus pauvres confine à une complicité intolérable.

(1) Rapports d’inspection SPP IS à partir du 2015, https://www.mi-is.be/fr/outils-cpas/rapports-dinspection

(2) Rapports d’inspection SPP IS 2020, CPAS Eghezée, CPAS Colfontaine, etc, https://www.mi-is.be/fr/outils-cpas/rapports-dinspection

(3) C. Trav. Bxl, 21 avril 2010, RG n°2008/AB/51.591, www.terralaboris.be ; M. DE RUE, La procédure administrative, in Aide sociale – Intégration sociale, Le droit en pratique, La Charte, 2011, p. 533.) ; AR 1er décembre 2013, relatif aux conditions minimales de l’enquête sociale établie conformément à l’article 19, §1er, de la loi du 26 mai 2002 concernant le droit à l’intégration sociale (articles 9 et 10) ; AR 11 juillet 2002 portant règlement général en matière de droit à l’intégration sociale (Article 6, §3 et §1er, 4°).

(4) Loi « Only once », 5 mai 2014 garantissant le principe de la collecte unique des données dans le fonctionnement des services et instances qui relèvent de ou exécutent certaines missions pour l’autorité et portant simplification et harmonisation des formulaires électroniques et papier, M.B., 04.06.2014.

(5) Notamment Cass., 3 septembre 2016, J.T.T., 2016, p. 468.. ; spéc. p.470, 5e branche du moyen. (Voir l’extrait de l’arrêt)

(6) C. Trav. Bxl., 4 juin 2015, RG n°5015/AB/38, www.terralaboris.be ; M. DE RUE, La procédure administrative, in Aide sociale-Intégration sociale. Le droit en pratique, La Charte, 2011, P. 539. Cass. 3 septembre 2016, J.T.T., 2016, p. 468, spéc. P. 470, 5e branche du moyen.

(7) T.T. Bxl (16e Ch.), 1er mars 2019, x c. CPAS d’Uccle, RG n°18/5092/A ; C.T. Bxl (8e Ch.) , 24 juin 2020, RG 2019/AB/266, www.terralaboris.be

(8) M. DE RUE, La procédure administrative, in Aide sociale-Intégration sociale. Le droit en pratique, La Charte, 2011, P. 539. et s. ; P. VERSAILLES, Le droit à l’intégration sociale, Kluwer, 2014, n°1320, p. 289. ; J.-F. NEVENS, « lLa révision et la récupération », in Aide sociale-Intégration sociale, le droit en pratique, La Charte, 2011, p. 566 et réf. citées.

(9) Trib. Trav. Liège, 10 mars 2006, RG n°337.930, Inédit, cité par P. VERSAILLES, Le droit à l’intégration sociale, Kluwer, 2014, n°1323, p.290.

(10) Trib. Trav. Charleroi, 7 févier 2006, RG n°65 719/R, Inédit, cité Ppar P. VERSAILLES, Le droit à l’intégration sociale, Kluwer, 2014, n°1323, p.290.

(11) Pour plus d’infos : Association Défense Allocataires Sociaux (aDAS), 19.09.20, Fiche info «Suis-je obligé de fournir mes extraits de compte bancaire au CPAS? », https://www.adasasbl.be .

Partager cet article

Facebook
Twitter